Vendange 2016 – Bilan de récolte, par James.

Château Unang – Ventoux – Rhône

Saison et récolte 2016 :

Un hiver sec a précédé la saison, et ce ne fut pas pour nous rassurer puisque dans le sud nous comptons sur un hiver raisonnablement pluvieux (100mm/mois avec de la chance), sachant que l’été sera sec (moins de 50mm/mois). La pluie remplit les nappes phréatiques, ces dernières se libérant lentement l’été avançant.

Avec l’hiver doux, ainsi que sec, la saison a démarré rapidement et avec elle nos craintes concernant l’activité des insectes (verres des grappes) et la pression de la maladie (oidium, mildiou). Pour la vie des insectes, ce qui était de bonnes conditions pour eux étaient également de bonnes conditions pour les espèces qui les chassent (coccinelles, etc), et finalement un seuil d’équilibre naturel des populations a été noté. Par contre, il fallait rester attentif au mildiou.

La sécheresse s’est terminée en mai alors que le Grenache s’approchait de la floraison. Les températures fraîches du printemps (y compris un léger gel dans la vallée au début du mois de mai affectant le Grenache Blanc) ralentirent tout et n’étaient pas sans évoquer les conditions observées en 2013, où le Grenache Blanc avait alors souffert d’une mauvaise floraison (nous avions perdu près de 50% de fruit potentiel dans certaines parcelles pour cause de coulure). Le peu de pluie que nous avons eu cette année arriva à ce moment-là. Ceci refroidit davantage le sol et a rendu difficile l’absorption d’azote nécessaire aux vignes pour une floraison réussie. Frustration totale, puisque la pluie se manifestait souvent mais en petite quantité, les volumes étaient loin d’être significatifs. Fatalement, la floraison du Grenache ne fut pas grande et ce fut le premier élément signalant une récolte légère pour Unang en 2016.

A partir de là, ce fut la sécheresse. Les précipitations à Unang pour les mois de juin (20mm), juillet (15mm) et août (15mm) furent très faibles. Sans compter des températures dépassant aisément les 30 °C pour les mois de juillet et août : les vignes n’ont pas eu la vie facile. Le peu d’humidité qu’il y avait dans le sol s’est avéré assimilable pour nos vieilles vignes établies, de telle sorte que le degré de stress hydrique ne fut pas extrême et les vignes sont heureusement restées vertes. La typicité du terroir d’Unang existe en partie de par la présence de ses nombreuses sources. De fait, on constate une humidité naturelle du sol, son impact grandissant, au plus bas les vignes sont implantées. De plus, l’altitude dont nous bénéficions (jusqu’à 350m sur le domaine ; avec des collines avoisinantes de + 700m) apporte une certaine fraîcheur. La forêt environnante a également un impact. L’ombre générée par la forêt crée elle aussi une certaine fraîcheur qui va glisser jusqu’en bas de la colline et ventiler les vignes. L’orientation aide aussi – nous faisons face à l’est et au sud – évitant ainsi la chaleur du soleil couchant qui peut «cuire» les raisins en fin d’après-midi (la canopée les protégeant d’un grand soleil au sud). Ce sont toutes ces raisons ci-dessus qui contribuent à la fraîcheur de nos vins.

Malheureusement, nous avons planté quelques centaines de vignes de remplacement cette année et les garder en vie s’est révélé être un défi. N’étant pas en production nous les avons arrosé régulièrement en septembre (quand nous avions tout juste 34mm de pluie).

Ainsi, la sécheresse a été le deuxième facteur conduisant à de faibles rendements en 2016. Le manque de pluie signifiait que d’autres maladies, notamment le mildiou et la pourriture, étaient absents du vignoble : les raisins étaient très sains. Les sangliers (dont le nombre ne cesse de croître) acquiescèrent – et se servirent. Ces derniers deviennent un véritable problème et en dépit des efforts (décevants) de la chasse locale, nous mettons de plus en plus de clôtures électriques en août pour protéger nos grappes. On estime que le nombre de sangliers a quadruplé localement au cours des cinq dernières années, une explosion démographique.

Quelles que furent nos contraintes cette saison, nous n’avons été touchés ni par de graves gelées, ni par des inondations ou la grêle, comme ce fut le cas dans certaines régions de France cette année, Chablis étant parmi les plus durement touchés. Ça, c’est brutal. Ici, la souffrance réelle vient des feux sauvages (et pas si sauvages… c’est-à-dire incendie criminel) en raison de la sécheresse, et particulièrement quand le Mistral rejoint la partie. Un incendie près de Marseille a détruit plus de 900 hectares (vous pouvez voir le résultat près de l’aéroport).

La récolte devait être précoce (hiver doux), puis tardive (printemps froid), puis précoce à nouveau (sécheresse). En fin de compte, nous avons commencé avec le rosé le 13 septembre et nous avons fini le 11 octobre, ce qui n’est pas si différent de la moyenne décennale. Le fruit était en excellent état, mais les rendements étaient faibles sur le Grenache – environ un tiers de moins que l’année dernière. Des peaux épaisses signifiaient que la sur-extraction était un risque plus grand que d’habitude, et nous avons visé (comme toujours), au plus juste, pour parvenir à notre style le plus élégant.

Le Grenache a davantage souffert qu’il est planté plus haut sur la colline, où les effets de la sécheresse sont plus marqués que sur les parcelles inférieures. Son implantation plus reculée en fait un site de choix pour les festins de nos « amis » sangliers. Concernant la Syrah, elle est également moins touchée par la casse. Les blancs (également en baisse de volume d’un tiers) sont expressifs – avec la Clairette, le Grenache Blanc et la Roussanne – et le rosé est à la fois pâle et charmant.

Les faibles rendements signifient que les niveaux de sucre sont légèrement plus élevés sur le Grenache, mais la fraîcheur est assurée grâce à l’acidité de notre terroir. La clé pour obtenir ce résultat a été d’attendre, car bien que le sucre était présent à partir de la mi-Septembre, la maturité est arrivée des semaines plus tard.

Certaines parcelles de Syrah offrent une très belle intensité et on note une agréable présence florale sur la Syrah et le Grenache. Nous sentons déjà la qualité du millésime alors même que le dernier gramme de sucre fermente. Nous devrions y voir plus clair après la fermentation malo-lactique – aucun signe pour l’instant mais elle peut apparaître lentement (et finir l’année prochaine?) en même temps que les températures tomberont.

JK – 31.10.2016

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